Par Elisabeth Gibeau, Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics
Pendant que l’opposition à l’austérité bat son plein au Québec, dans le secteur public comme dans les groupes communautaires, la première conférence internationale sur la concurrence fiscale, TaxCoop, avait récemment lieu, à Montréal. Organisée par la fiscaliste Brigitte Alepin, auteure du livre Ces riches qui ne paient pas d’impôt et du documentaire Le prix à payer, des spécialistes de partout dans le monde sont venus nous y entretenir de l’avenir des régimes fiscaux. Le fiscaliste Godbout y participait d’ailleurs, afin de faire le «portrait d’une fiscalité québécoise adaptée au Québec du 21ème siècle»…
Un portrait qui reprenait les grandes lignes du rapport de la Commission sur l’avenir de la fiscalité québécoise, qu’il présidait l’an dernier : baisser les impôts et hausser la TVQ et les tarifs (électricité, services de garde, …), le nouveau credo Godbout, repris avec un enthousiasme débordant par le ministre des Finances du Québec, M. Carlos Leitao.
Pourtant, M. Godbout y a entendu, comme nous, Mme Becker, de l’Académie fédérale des finances à Berlin, affirmer avec force qu’il faut éviter à tout prix de reporter la fiscalité sur le travail, la consommation et la propriété, car les impôts sur le revenu, pour les entreprises et les particuliers, continuent d’avoir un rôle important à jouer. Il a également pu entendre l’économiste en chef de la Banque mondiale, Mme Moreno-Dodson, témoigner du fait que, trop souvent, les coûts sociaux des mesures fiscales ne sont pas pris en compte.
Ces coûts sociaux que la Commission sur l’avenir de la fiscalité québécoise n’a justement pas considérés. En effet, l’étude de Wen, Dahlby et Ferede, sur laquelle le rapport Godbout fonde ses conclusions, stipule très clairement qu’il aurait été possible d’y inclure une mesure du coût social de la perception des impôts et des taxes, mais que cela n’a pas été fait. Ils y affirment qu’«un impôt supporté principalement par les pauvres comporte un coût social élevé». Lequel ? On n’en saura pas plus à la lecture de l’étude. Cette dernière n’estime pas non plus les coûts supplémentaires pour l’État engendrés par des gens qui auraient davantage recours aux services publics (santé, services sociaux) en raison de l’application de mesures fiscales régressives qui grève leur portefeuille, tels les taxes à la consommation et les tarifs.
Une analyse partielle, donc, ce dont ne fait jamais mention M. Godbout et ses chantres, tout heureux qu’ils sont d’annoncer que les taxes et les tarifs feraient des miracles pour l’économie québécoise… sans tenir compte de l’effet de ces modes d’imposition sur les gens, leur niveau de vie et leur budget.
Encore plus aujourd’hui qu’hier, au diapason d’un nombre grandissant d’experts internationaux, nous exigeons du gouvernement Couillard qu’il n’engage pas le Québec dans une réforme fiscale basée sur un rapport incomplet. Nous le répétons, encore et encore : nous aurions les moyens de faire autrement.